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Les successeurs d'Agassi, Courier et Chang

Si l'on se fie à la logique du classement, ils sont à leur place, ni plus ni moins. Mais voir Tommy Paul (n°12), Ben Shelton (n°13) et Frances Tiafoe (n°15) rejoindre conjointement la deuxième semaine de Roland-Garros n'était pas forcément en tête de liste des prédictions les plus évidentes en début de tournoi. D'une part, parce qu'aucun d'entre eux ne l'avait fait jusque-là. D'autre part, parce que l'on n'avait plus vu un trio de joueurs américains en deuxième semaine à Paris depuis 1995 (Andre Agassi, Jim Courier et Michael Chang, futur finaliste cette année-là).

Ils seront même quatre si le moins attendu Ethan Quinn, issu des qualifications, les rejoint ce samedi en créant la surprise face à Tallon Griekspoor. Auquel cas, ce serait une première depuis 1991. Les Américains se sont parfaitement relevés de la défaite d'entrée de leur numéro 1, Taylor Fritz, pour signer un magnifique tir groupé qui vient balayer bien des idées reçues sur le rapport des joueurs d'Outre-Atlantique avec la terre battue européenne.

"On sait tous que Roland-Garros est historiquement un tournoi où les Américains n'ont pas eu très de bons résultats, alors nous avons très envie d'aller loin, confirmait Ben Shelton, qui a disputé cette année, à Munich, sa première finale sur l'ocre européen. J'en parlais avec Frances l'autre jour : on sent que les Américains regardent de plus en plus le tournoi et s'y intéressent de plus en plus. En ce qui concerne Tommy, en exagérant à peine, la terre battue est peut-être sa meilleure surface. En tout cas, il n'a pas peur de se salir les chaussettes. Et nous non plus, désormais."

Même si leurs attentes vont sans doute au-delà, la performance est déjà réelle pour Paul, Shelton et Tiafoe, qui ont désormais atteint les huitièmes de finale de tous les Grands Chelems.

Shelton, le goût de l'ocre

Dans l'ère Open, Shelton est d'ailleurs seulement le cinquième joueur américain à y parvenir à moins de 23 ans, après Aaron Krickstein, Jim Courier, Pete Sampras et Michael Chang. Et il l'a fait sans perdre d'énergie, ce qui était une obligation pour avoir ses chances face au tenant du titre, Carlos Alcaraz, qui se présente désormais à lui.

Après avoir bénéficié au deuxième tour du forfait d'Hugo Gaston, le Floridien est très facilement venu à bout du qualifié Matteo Gigante (6/3, 6/3, 6/4 en 2h19) au troisième tour, vendredi. L'Italien était certes assez loin du niveau qui lui avait permis, au tour précédent, de s'offrir la plus belle victoire de sa carrière face à Stefanos Tsitsipas. Mais Shelton a livré de son côté une prestation très convaincante. Peut-être sa meilleure sur terre battue.

Le fruit d'un travail particulier ? "L'idée est d'adapter légèrement mon jeu à la terre battue mais sans le dénaturer, a-t-il répondu. Je vais continuer à pratiquer un tennis agressif, monter souvent au filet et faire des services-volées. Je commence à comprendre que je n'ai pas forcément besoin de pratiquer un tennis 'classique' de terrien, à renvoyer des balles hautes et liftées loin derrière ma ligne, pour être efficace sur cette surface. Je dois, au contraire, garder mon style habituel."

Paul le combattant

C'est en substance ce qu'a aussi dit Tommy Paul, vainqueur juste avant lui, sur ce même court Simonne-Mathieu, d'un combat de plus de quatre heures pour venir à bout de Karen Khachanov (6/3, 3/6, 7/6(7), 3/6, 6/3) en sauvant deux balles de deux sets à un contre lui. "Je n'ai pas spécialement cherché à pratiquer un tennis de terre battue, a raconté celui qui a gagné le tournoi juniors à Paris en 2015. Ma seule préoccupation quand je joue, quelle que soit la surface, c'est d'être celui qui est dans l'agression. Sinon, cela devient difficile."

Enfin, Frances Tiafoe et Sebastian Korda ont clos la soirée sur le court Suzanne-Lenglen en disputant le premier troisième tour 100% US à Roland-Garros depuis un Andre Agassi-Chris Woodruff en 1999. Un duel qui a finalement tourné court, "Sebi" souffrant de douleurs au dos. Après avoir mis sept ans à gagner un match à Paris, Tiafoe a rallié cette année la deuxième semaine sans perdre un set. Qui l'eût cru ?