Interview : Lorenzo Musetti, à sa place dans l'élite

L’Italien fait ses grands débuts dans le Top 10, une place à laquelle il se sent bien.

Lorenzo Musetti / Huitièmes de finale Monte-Carlo 2025©Antoine Couvercelle / FFT
 - Reem Abulleil

Il y a quatre ans, c’est en tant qu’adolescent que Lorenzo Musetti réalisait des débuts impressionnants dans le tableau principal d’un Majeur, à Roland-Garros. L’Italien, alors âgé de 19 ans, s’était hissé jusqu’en huitièmes de finale à Paris, menant 2 sets à rien contre Novak Djokovic, alors numéro 1 mondial, avant d’abandonner en fin de cinquième manche.

Avant le début de cette édition 2021, Musetti avait déjà eu l'occasion de s'entraîner avec Rafael Nadal sur les courts du complexe Jean Bouin, à deux pas du stade Roland-Garros. "Je me souviens avoir perdu 6-1 contre lui. Je craignais un peu de l’affronter", s’est souvenu l’intéressé. Ce sentiment, et ces jours-là, doivent désormais sembler lointains pour celui qui a intégré cette semaine le top 10 mondial pour la première fois. Il faut dire que ses dernières saisons lui ont donné confiance et la conviction d’être à sa place dans l’élite.

La surprise de Wimbledon

L'année dernière, le – désormais – 9e joueur au classement ATP a réalisé une excellente saison sur gazon, atteignant les demi-finales à Stuttgart, la finale au Queens et surtout sa première demi-finale en Grand Chelem, à Wimbledon.

"Honnêtement, je dirais que c'était un peu une surprise car je n'avais pas beaucoup joué sur cette surface. Mais quand j'ai commencé à jouer sur gazon, j'en suis tombé amoureux, a-t-il avoué à Roland-Garros.com lors d’une récente interview. Et je vois des similitudes entre le gazon et la terre battue. Ce n'est plus comme il y a 30 ans, où la vitesse empêchait les échanges. Bien sûr, le service et le retour sont très importants, bien plus que sur ocre, mais je pense qu'avec mon slice et toutes mes variations, je peux vraiment l'utiliser comme une arme. J'aime donc vraiment jouer sur les deux."

"Maintenir la dynamique"

Ce printemps, Lorenzo Musetti réalise un parcours tout aussi impressionnant que l’an passé, mais cette fois-ci, sur terre battue – la surface sur laquelle il a grandi – avec une finale à Monte-Carlo et une demi-finale lors du Masters 1000 de Madrid avant de prendre part au tournoi de Rome, à domicile donc. Ces résultats ont permis au joueur de 23 ans de gagner sa place dans le top 10, un cap qu'il a toujours rêvé d'atteindre.

"Je pense que la manière dont j’ai joué cette année, et je dirais même la saison dernière, a confirmé mon niveau. J’ai également fait preuve de régularité. Cela m'a probablement donné une motivation et une confiance supplémentaires pour mériter ma place aujourd'hui", a déclaré le Toscan. Dans la capitale italienne, il a expliqué aux journalistes qu’il tenterait de "maintenir la dynamique" dès son premier match contre le qualifié finlandais Otto Virtanen.

Carlos Alcaraz & Lorenzo Musetti / Trophées, Monte-Carlo 2025©Antoine Couvercelle / FFT

Carlos Alcaraz et Lorenzo Musetti lors de la remise des Trophées à Monte-Carlo 2025

Une mentalité de top 10

S'il a le sentiment que rien ou presque ne va changer pour lui maintenant qu'il fait partie du top 10, il a toutefois conscience que les choses pourraient être un peu différentes sur le plan mental.

"Atteindre la finale d'un Masters 1000, comme à Monte-Carlo, avec beaucoup de hauts et de bas pendant mes matchs, puis s'arrêter une semaine – presque deux, parce que j'ai joué le week-end de la deuxième semaine – et accéder aux demi-finales de Madrid sans perdre un set… C'est la confirmation de mon niveau actuel et de ma mentalité. Être dans le Top 10, c’est essayer de ne pas perdre contre quelqu’un de moins bien classé que soi, a-t-il expliqué. C’est quelque chose que n’ai encore jamais expérimenté lorsque j’étais en dehors, quand j’étais dans le Top 50, par exemple. Jouer contre un Top 10, c’est spécial et d’ailleurs, c’est aussi très différent de gagner contre un membre du Top 10. Désormais, je suis de l’autre côté de la barrière.

Ambitions parisiennes

Joueur malin et polyvalent, Musetti estime avoir pleinement saisi la véritable identité de son style de jeu et entre désormais sur le court avec détermination. Il espère désormais que sa qualification pour le dernier carré à Wimbledon en 2024 lui permettra de briller à Roland-Garros, où il a déjà atteint la deuxième semaine à deux reprises.

"Mes meilleurs résultats à Paris ont été deux huitièmes de finale. Mon objectif et mes attentes cette année sont d’aller encore plus loin. Mais je ne veux pas trop penser à l'avenir, a-t-il confié. J'ai vécu l'expérience de Wimbledon et le point positif là-bas, c’était ma mentalité : j’ai pris les matchs les uns après les autres, sans trop me projeter plus loin. Je vais essayer de reproduire ce schéma."

Lorenzo Musetti / Deuxième tour - Roland-Garros 2024 - Philippe Montigny FFT©Philippe Montigny / FFT

Lorenzo Musetti avant son deuxième tour lors de Roland-Garros 2024

Une médaille de bronze historique

Mais l’édition passée de Wimbledon n'est pas la seule expérience positive dont Lorenzo Musetti peut s'inspirer en vue de Roland-Garros 2025. Toujours l’été dernier, il a décroché une médaille de bronze aux Jeux sur la terre battue parisienne, devenant ainsi le premier joueur de tennis de l’histoire de son pays à monter sur le podium olympique. Ses compatriotes Sara Errani et Jasmine Paolini ont fait encore mieux et ont décroché l'or en double féminin le lendemain !

"J’ai toujours eu de très bonnes sensations dans les conditions du tournoi de Roland-Garros. Et même si c'était deux mois plus tard, je me suis très bien senti aussi aux Jeux olympiques, a-t-il déclaré. C'est probablement le plus bel accomplissement de ma carrière jusqu’à présent, et certainement le plus émouvant aussi. C’est sûrement une bonne chose d’avoir de si bons souvenirs et de les garder en tête quand je joue."

À mi-chemin de sa cinquième année sur le circuit, l’Italien se sent à présent comme un joueur expérimenté. "Je me souviens de l'époque où je venais d’arriver sur le circuit, de ma première ou de mes deux premières années. Chaque tournoi était nouveau, on n'y était jamais allé, on ne connaissait pas les gens, les conditions, les hôtels, la ville, s’est-il remémoré. Aujourd'hui, je ne veux pas dire que je suis un vétéran, mais j'ai vu beaucoup de choses et, bien sûr, beaucoup de choses ont changé. Je suis devenu père, j'ai une famille à gérer, donc j’ai beaucoup plus de responsabilités, même sur le plan humain. Mais ils m'ont aussi permis d’être une meilleure version de moi-même sur le court."

Assumer ses responsabilités

Lorenzo Musetti et sa compagne Veronica Confalonieri ont en effet accueilli leur premier enfant, Ludovico, il y a un peu plus d'un an. Il affirme qu'être père l'a incité à adopter l'idée de devenir un modèle pour les autres.

"Avoir plus de responsabilités encourage forcément à devenir une sorte d'exemple, non seulement pour mon enfant, mais aussi pour tous les enfants qui regardent le tennis et qui rêvent de devenir joueurs professionnels ou qui aiment simplement ce sport", a-t-il répondu lorsqu'on l’a interrogé sur son évolution depuis sa paternité. Essayer d'être un exemple aussi bien sur le court qu’en dehors, je dirais que c’est mon objectif principal."

Et puisque c’est désormais sa volonté, il n’est pas étonnant que son attitude soit sa plus grande fierté lorsqu’il évoque sa finale à Monte-Carlo. "Je pense que c’est l’état d'esprit dont j'ai fait preuve sur le court. Le combattant que j'ai affronté à Monte-Carlo m'a vraiment surpris, mais je dirais que je dois continuer d’être comme ça durant ma carrière et j’espère, lors de chacune de mes saisons", a-t-il conclu.