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Wimbledon 2025 : les adieux de Petra Kvitova au All England Club

Mardi, la double championne a disputé son dernier match à SW19.

Petra Kvitova / Deuxième tour Wimbledon 2019©Corinne Dubreuil / FFT
 - Reem Abulleil

En tant que joueuse, il y a toujours eu deux Petra Kvitova, aimées et redoutées de la même manière. La première, c’est la Kvitova impitoyable, qui ne prend pas de gants et ne laisse aucune chance à ses adversaires, les écrasant sous une avalanche de coups gagnants et leur ôtant complètement la raquette des mains. Quand elle jouait de cette façon, ses vis-à-vis n’avaient plus qu’à l’applaudir. Demandez à Maria Sharapova ou à Eugenie Bouchard, toutes deux battues en finale de Wimbledon lors des éditions 2011 et 2014.

Belinda Bencic avait même inventé le hashtag #petrasvictims sur les réseaux sociaux après avoir été sèchement battue par la gauchère tchèque lors de l’Open d’Australie 2019. Au tour suivant, Amanda Anisimova avait subi le même sort avant de publier sur les réseaux : "J’ai pris une leçon de tennis aujourd’hui, mais au moins c’était face à l’une des meilleures du monde, non ?" Bencic avait alors commenté : "Bienvenue dans le club des #petrasvictims." Lorsque Kvitova était dans un grand jour, tout le monde savait qu’il n’y avait quasiment aucune chance de la battre.

L’autre facette de Kvitova est celle qui a inspiré le surnom "P3tra", clin d’œil à sa tendance à prendre le chemin le plus long vers la victoire, préférant souvent les matchs en trois sets plutôt que de conclure en deux manches. Ces combats-là, elle les menait surtout contre elle-même. Et c’était toujours un mystère de voir comment elle parvenait à vaincre ses démons pour aller chercher ces victoires.

Cette semaine, à 35 ans, elle a disputé son dernier Wimbledon et mettra officiellement un terme à sa carrière à l’US Open cet été. Alors qu’elle s’apprête à dire adieu au tennis, Kvitova s’est confiée sur ce que cela représentait de naviguer entre ces deux versions d’elle-même tout au long de sa carrière.

"Il y a toujours eu des hauts et des bas dans ma carrière, a confié l’ancienne n°2 mondiale aux journalistes présents au All England Club. Je pouvais jouer un tennis incroyable… ou terrible. Disons-le comme ça : même si ça ne se voyait pas, il y avait toujours un combat en moi. Peut-être même parfois contre moi-même. Mais j’ai été élevée comme ça, avec l’idée de lutter jusqu’au dernier point. Que je joue bien ou très mal, je me suis toujours battue."

Alors, à laquelle de ses deux facettes s’identifie-t-elle le plus ? "C’est une question vraiment difficile. Parce que les deux font partie de moi", a-t-elle répondu avec le sourire.

Double lauréate en Grand Chelem, médaillée de bronze olympique, sextuple championne en Billie Jean King Cup, sacrée aux Finales WTA… Kvitova a bâti un palmarès qui fait d’elle une candidate évidente pour le Hall of Fame, auquel elle pourra prétendre dans cinq ans. Mais ce dont on se souviendra peut-être encore davantage, c’est de sa popularité sans faille sur le circuit, dans les vestiaires et au-delà.

Après son dernier match à Wimbledon (défaite face à Emma Navarro, tête de série n°10), nombre de ses pairs ont été émus aux larmes en l’écoutant prononcer son dernier discours sur le Court n°1. "J’ai vu ça dans le vestiaire avant mon match. J’avais les larmes aux yeux et la chair de poule quand elle parlait. C’était un moment vraiment spécial, a confié Belinda Bencic à rolandgarros.com. Mon souvenir préféré de Petra ? Elle ne s’en souviendra sûrement pas, mais c’était probablement notre première rencontre, à Tokyo, en 2013 je crois. Je bénéficiais d’une wild-card, j’avais battu Daria Saville pour avoir le droit d’affronter Petra. J’avais 16 ou 17 ans, c’était énorme pour moi. Aujourd’hui, c’est l’une de mes meilleures amies, nous sommes deux mamans complices. Elle était mon idole et aujourd’hui nous sommes très proches."

En la croisant mardi, Maria Sakkari n'a pas manqué de serrer Kvitova dans ses bras et n’a pas tari d’éloges sur la future retraitée.

"C’était une joueuse vraiment unique, mais avant tout, c’est une personne exceptionnelle, a insisté la Grecque. Ce sera toujours la première chose que je retiendrai d’elle. Ensuite, son tennis était tout aussi unique. Quand elle était dans un grand jour, eh bien, ‘bonne chance’ ! C’était mission impossible. Sa carrière a été incroyable et elle n’a pas encore fini, bien sûr, il lui reste quelques tournois. Mais je pense qu’elle est en paix avec elle-même. Elle a sa famille, elle a accompli des choses exceptionnelles et elle a l’air heureuse. On dirait qu’elle a choisi le bon moment, elle n’a pas de doute là-dessus. Je viens de la croiser, je l’ai prise dans mes bras et je lui ai dit que j’étais fière d’avoir pu faire partie, au moins un petit peu, de son aventure. Pour moi, elle restera toujours comme l’une des joueuses les plus souriantes et les plus aimées du vestiaire, et de loin. Et sans doute l’une des plus talentueuses de ces dernières années."

Petra Kvitova & Maria Sakkari / Troisième tour US Open 2021©Paul Zimmer / FFT

Paula Badosa a confié que Kvitova était l’une de ses joueuses préférées quand elle était plus jeune. Quant à Madison Keys, elle adorait la regarder jouer.

De son côté, Ons Jabeur a loué son mental, notamment lorsqu’elle est revenue au plus haut niveau après avoir été victime d’une agression au couteau à son domicile, retrouvant les terrains sans avoir encore totalement récupéré ses sensations au niveau de sa main blessée. "C’est vraiment une joueuse incroyable, et elle a beaucoup de courage, a détaillé la Tunisienne. Mentalement, elle est très forte. Ce qui lui est arrivé chez elle, puis revenir de cette manière… c’est tout simplement incroyable. J’ai beaucoup de respect pour Petra, et je suis heureuse d’avoir pu partager le court avec elle."

Petra Kvitova & Ons Jabeur / Huitièmes de finale Wimbledon 2023©Corinne Dubreuil / FFT

Petra Kvitova est totalement en paix avec sa décision de raccrocher, bien que son retour post-maternité aura été de courte durée. Elle aura eu l’occasion de jouer une dernière fois devant le public de Wimbledon et emporte avec elle plus de 15 ans de souvenirs dans son jardin préféré.

Interrogée sur la manière dont elle espère qu’on se souviendra d’elle, elle a simplement répondu : "J’espère qu’on se souviendra de moi comme d’une fille normale, venant d’une petite ville de République tchèque, élevée par des parents sans moyens. Je resterai toujours très humble. J’ai toujours essayé de jouer avec fair-play. Alors j’espère qu’on se souviendra de moi comme d’une personne tout à fait normale."

Une personne normale avec un cœur extraordinaire. Et au cours des prochaines semaines jusqu’à son dernier adieu, nous continuerons de lui dire : Merci, Petra !