En juin 2024, Carlos Alcaraz remportait un troisième titre du Grand Chelem, le premier sur la terre battue parisienne. Quelques mois plus tard, il réévoque ce succès inoubliable mais aussi la suite, ainsi que son idole - désormais retraitée -, Rafael Nadal.
Interview Carlos Alcaraz : "Un rêve devenu réalité"
Carlos Alcaraz est revenu sur son premier succès mémorable Porte d'Auteuil, en exclusivité pour le magazine de Roland-Garros.

Un an s'est écoulé depuis votre sacre à Roland-Garros : est-ce que vous réalisez désormais ce que vous avez accompli ?
J'ai eu le temps d'y penser, oui, et de réaliser que j'avais gagné Roland-Garros, puis Wimbledon. Revenir à Paris, c'est incroyable, surtout maintenant que j'ai tous ces souvenirs qui me reviennent.
Quelle est votre histoire avec Roland-Garros, en tant que supporter d'abord, lorsque vous étiez tout jeune, et puis en tant que vainqueur du tournoi ?
Roland-Garros a une place très spéciale pour moi. J'y ai bien sûr vu de nombreux joueurs espagnols performer, dont Rafa Nadal. Enfant, je me souviens que je me dépêchais de rentrer de l'école pour allumer la télévision et je ne voulais qu'une chose : passer l'après-midi à regarder des matchs. Quand j'avais 11 ans, j'ai joué un tournoi à Roland-Garros pour la première fois. Ensuite, on pouvait aller regarder des matchs et si je ne me trompe pas, le premier joueur que j'ai vu, c'était Richard Gasquet. Je me souviens m'être dit : "Un jour, je serai là. Un jour, je vais jouer ici à Roland-Garros". Quelques années plus tard, en qualifications, j'ai perdu au premier tour (défaite contre Aleksandar Vukic en 2020, ndlr). Je suis revenu, j'ai joué les qualifications une fois de plus et j'ai eu la chance d'intégrer le tableau principal. Après ça, j'ai accumulé de l'expérience, vécu des moments inoubliables sur le court, et l'an dernier, la victoire finale. C'était incroyable, un rêve devenu réalité. J'ai toujours voulu gagner Roland-Garros.

Carlos Alcaraz lors de son deuxième tour à Roland-Garros 2022
Vous n'avez que 22 ans et un palmarès déjà extrêmement impressionnant. Quelles sont les qualités qui vous ont permis d'atteindre ce niveau ?
J'ai vraiment travaillé très très dur pour arriver jusqu'ici. Il faut du talent, bien sûr, mais, sans travail, cela ne sert à rien. Pendant des années, j'ai travaillé, j'ai sacrifié plein de choses quand j’étais plus jeune pour atteindre mon objectif, réaliser mes rêves, devenir un joueur professionnel. Je pense que le secret, c’est d’investir tout le temps et toute l’énergie nécessaires sur le court et de grandir avec les meilleures personnes possibles autour de soi. Ça aide aussi beaucoup d’être très bien entouré et je pense que c’est ce que je suis parvenu à faire : je suis avec de belles personnes, professionnelles, qui m’aident à devenir un meilleur joueur, une meilleure personne. Mes parents ont aussi joué un rôle essentiel, bien sûr.
Vous avez connu des hauts et des bas et surmonté de grands défis aussi. Qu’est-ce qui vous a le plus aidé dans ces moments-là ?
Mes proches. Ils sont toujours là pour moi quand j’en ai besoin. Ils ont été là dans les moments importants ; ils ont su m’apporter le calme parfois nécessaire. C’était vraiment le plus important et le plus utile. Pouvoir s’entourer des bonnes personnes quand c’est un peu plus difficile, c’est primordial. Quand j’ai connu des bas, quand j’ai perdu des matchs que j’avais vraiment envie de gagner, c’est comme prendre une grande claque. Grâce à eux, j’ai réussi à me dire à chaque fois : "Ok, je suis là où j’ai toujours rêvé d’être depuis que je suis enfant. Donc il n’y a pas de quoi être en colère, pas de temps à perdre dans la frustration. Il est simplement temps de continuer et d’apprécier le moment présent". C’est ma mentalité et je la dois en grande partie à mes proches.

Carlos Alcaraz au deuxième tour de Roland-Garros 2023
Parlons de Rafael Nadal. Vous avez joué ensemble lors des Jeux olympiques et il a toujours été l’un de vos joueurs préférés. Qu’est-ce que vous admirez le plus chez lui ?
Sa façon de jouer, sa manière d’être sur le court, sa mentalité, son amour du jeu. Rafa est une personne exceptionnelle, très humble. Quand vous le rencontrez pour la première fois, c’est juste quelqu’un comme vous et moi. Ça a été vraiment incroyable d’être si proche de mon idole, d’apprendre à ses côtés et aussi de le côtoyer en tant que personne. J’ai vécu une expérience exceptionnelle.
Qu’avez-vous appris à ses côtés ?
Sa manière d’appréhender un match, la passion avec laquelle il joue chaque rencontre et comment il s’y prépare aussi. En jouant le double avec lui, j’ai aussi appris comment il gérait certaines situations et la pression. Ce sont des éléments qui vont m’être très utiles tout au long de ma carrière. Il a été l’un des meilleurs ambassadeurs du tennis, et je pense que son héritage sera éternel. Il a probablement été l’un des joueurs qui ont placé le tennis au sommet du sport, au sommet du monde. C’est donc formidable d’avoir eu Rafa dans le tennis et à cette période de ma vie.

Carlors Alcaraz lors du Rolex Paris Masters 2024
Quelques mois après votre premier titre à “Roland”, vous avez remporté la médaille d’argent en simple. Comment avez-vous vécu ces JO ?
Je voulais participer aux Jeux olympiques, voir ce que c’était, ce que l’on ressent lorsqu’on représente son pays. Ça a été une motivation supplémentaire. Et puis, bien sûr, le fait que ce soit à Paris, quelques mois après avoir gagné ici, c’était très spécial pour moi. Jouer de nouveau sur le court Philippe-Chatrier, mais avec le drapeau espagnol sur le torse cette fois-ci, c’était une expérience vraiment inoubliable. C’est un moment que je vais garder en moi pour toujours.
Quelle est votre relation avec la terre battue ?
Je ne dirais pas que c’est ma surface préférée (rires). Je pense que c’est plutôt le dur, mais j’ai grandi en jouant sur terre. Quand j’ai commencé, je ne voulais jouer que sur terre battue. Je n’ai pas mis les pieds sur un court en dur avant mes 11 ou 12 ans ! La terre battue, c’est toujours spécial pour les joueurs espagnols. Je suis parvenu à élever mon niveau de jeu sur cette surface, je m’y sens bien et mon jeu s’y prête. J’aime chaque match que je joue sur cette surface et dès que la saison se termine pour passer sur gazon, cela me manque !

Carlors Alcaraz lors du Rolex Paris Masters 2024
Une dernière question qui concerne votre coach, Juan Carlos Ferrero. Il a gagné Roland-Garros alors que vous n’aviez que quelques semaines (en 2003). Avez-vous regardé des images de sa victoire à Paris ?
Oui, j’ai vu quelques photos, des vidéos et des highlights de ses matchs aussi, mais pas tant que ça. D’après ce que j’ai entendu de la part d’autres joueurs, il était vraiment très fort, solide derrière sa ligne. Très fort en retour aussi, mais je crois que sa meilleure arme, c’était sa façon de se déplacer : il bougeait très bien, et je rêve parfois d’avoir le même jeu que lui. Je crois qu’il était un joueur plus complet que je ne le suis aujourd’hui.

Carlos Alcaraz en demi-finales de Roland-Garros 2023